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Encyclopédie anarchiste
« La pensée libertaire constitue l’espoir et la chance des derniers hommes libres » Camus
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Article mis en ligne le 4 juillet 2022
dernière modification le 25 juin 2022

Land, Nick (1962-) : affirmant s’inspirer des idées de Deleuze, Guattari et Lyotard, ce professeur américain de philosophie commence par prétendre que les progrès technologiques du capitalisme transforment non seulement les sociétés mais les individus eux-mêmes. Dans ce cadre, il crée avec d’autres enseignants et étudiants une « Cybernetic Culture Research Unit » pour expliquer l’« accélérationnisme* » capitaliste. Au bout de quelques années, ce groupe explose et ses membres restants se tournent vers l’occultisme, avant de se disperser et de faire carrière dans le journalisme et la production musicale, et d’évoluer politiquement vers l’extrême droite ou vers l’extrême gauche. Land lui-même considère désormais que la démocratie est inutile et qu’il faut créer une monarchie capitaliste fondée sur une fusion entre les sommets de l’État et ceux des grandes entreprises. Le terme d’« accélérationnisme » a ensuite été repris par les néonazis et les suprémacistes blancs, mais dans un sens différent.

Lane, David (1938-2007) : il commence son itinéraire politique par la John Birch Society, organisation anticommuniste à laquelle il reproche de ne pas être antisémite, puisqu’il considère que « les nations occidentales sont manipulées par une conspiration sioniste [1] ». Il rejoint donc un groupe néonazi qui deviendra plus tard The Order, et est encore plus radical que le Ku Klux Klan et les différentes Aryan Nations. Lane souhaite déclencher une guerre raciale pour permettre « la survie » des Aryens (des Blancs). The Order se « fait connaître en 1984 après avoir mené une campagne de haine comprenant des meurtres, un attentat à la bombe contre une synagogue et une série de vols. On attribue à Lane la paternité du slogan “14 mots [2]” et des “88 préceptes [3]”, série de principes que de nombreux suprémacistes blancs et adeptes des idées néo-völkisch* [nationalistes-racistes] utilisent pour guider leurs choix de vie. Lane estimait que “la race blanche ne peut pas partager les dieux, la religion, la technologie, la nourriture, les femmes, le territoire ou quoi que ce soit de valeur avec une autre race” et que la société tribale, ethnocentrique et wotaniste* qu’il envisageait ne serait réalisable qu’après une période de dictature oppressive [4] ». Arrêté en 1985 avec 22 autres membres de The Order pour complicité de meurtre et braquage, il fut condamné en tout à 150 ans de prison, ce qui ne l’empêcha pas de continuer à écrire et publier frénétiquement des textes pour diffuser sa propagande raciste, antisémite et violemment hostile aux suprémacistes blancs chrétiens. Avec l’aide de sa femme qu’il épousa en prison il créa une espèce de nouveau culte, qu’il appela le « wotanisme* », et une maison d’édition.

LaRouche, Lyndon (1922-2019) : s’il milite dans le mouvement trotskyste entre 1949 et 1968, il crée ensuite sa propre secte, qui s’engagera en 1973 dans une série d’agressions physiques contre les militants du PC, du SWP américain (trotskyste), des groupes maoïstes et des partisans du Black Power. Ce groupe proto-fasciste s’est rapidement transformé en une organisation axée sur la collecte de renseignements concernant l’extrême gauche et la gauche. Ce nationaliste antisémite attaque le capital financier et la mondialisation avec une phraséologie qui peut apparaître anticapitaliste. Selon LaRouche, le monde est dominé par « une oligarchie anglo-juive qui est à l’origine d’un complot visant à affaiblir la société occidentale par le biais des banques internationales, du trafic de drogue et des sionistes, les Britanniques étant à l’origine d’un complot visant à balkaniser les États-Unis et la reine étant responsable du trafic de drogue ». Depuis 1976, LaRouche a essayé d’infiltrer aussi bien les partis bourgeois dominants (démocrate et républicain) que des groupes d’extrême droite, néonazis et négationnistes, des mouvements contre la guerre en Irak ou Occupy. Le correspondant français du groupe de Lyndon Larouche, Jacques Cheminade, régulièrement candidat aux présidentielles depuis 1995 et son groupuscule, Solidarité et Progrès, n’hésitent pas à affirmer que LO, le NPA et le PT seraient dirigés en coulisses par des Juifs (cf. l’article du 27 mars 2007 sur son site : « Gérard Schivardi, ombre synarchiste sur le mur du Parti des travailleurs »).

League of the South [5] : créée en 1994, cette organisation, qui regroupe plusieurs milliers de membres, souhaite créer une nation « bénie par Dieu » et dirigée par une élite « anglo-celtique » (d’origine exclusivement européenne, donc) qui mettrait en place un État chrétien théocratique. Cet État permettrait de mieux dominer les différentes minorités présentes sur le territoire nord-américain et d’accomplir « ce que la guerre de Sécession n’a pas accompli : la sécession des États du Sud [6] ». Hostile au métissage et favorable à la ségrégation, elle dispose d’une milice (les « Indomitables », les Indomptables) et fait partie depuis 2017 du Nationalist Front, regroupement d’organisations néonazies. Ses militants ont joué un rôle important dans les affrontements violents lors de la manifestation Unite the Right*, à Charlottesville, en 2017. Si, au départ, sa propagande avait un vernis universitaire, elle est devenue de plus en plus explicitement raciste : « La League of the South dénonce le gouvernement fédéral et les États côtiers ainsi que ceux du Nord [des Etats-Unis] comme faisant partie d’une société matérialiste et antireligieuse qu’elle appelle l’Empire. Ces dernières années, elle a de plus en plus prôné la violence, critiqué ce qui est perçu comme un “pouvoir juif ” et averti les Noirs qu’ils seraient vaincus dans une future guerre raciale [7]. »

Liardi, Jayme Luos : « Il a commencé sa carrière sur YouTube en 2012 avec sa chaîne Simply Vegan. Au départ, ses vidéos de style vlog étaient typiques de ce genre de chaîne – il conseillait la lecture indispensable de livres végétaliens, expliquait pourquoi il fallait arrêter de manger des produits animaux, et montrait chaque jour le contenu de ses repas. Mais vers 2014 ou 2015, son ton a changé. Il a commencé à épouser un code “guerrier” par rapport à son véganisme et à critiquer les pièges de la culture moderne “dégénérée”. Début 2015, il a donné un nouveau nom à sa chaîne, et présenté le véganisme comme une quête de vérité personnelle, vérité informée par son héritage européen : “C’est mon sang, c’est ma génétique.” Il est finalement passé de Simply Vegan à une chaîne éponyme où il défend une position altermondialiste et séparatiste raciale [8]. »

Linkola, Pentti (1932-2020) : écologiste finlandais, il se présentait comme un brave pêcheur qui se déplaçait dans une charrette tirée par un cheval pour vendre localement ses poissons. Il créa en 1995 la Finnish Nature Heritage Foundation pour protéger les forêts de son pays, ce qui donna peut-être une aura respectable à ce penseur de l’écofascisme : sur son site, il vantait les mérites de la « dictature » et prétendait s’inspirer de l’expérience « des nazis, des staliniens finlandais et des Brigades rouges » !!! Il voulait instaurer un contrôle des naissances fondé sur les « qualités des familles » et supprimer l’immigration et la liberté de circulation sur toute la planète, etc. Les éléments loufoques, réactionnaires et fascistes de son programme sont exposés sur son site, toujours actif après sa mort.

Livingston, Donald  : professeur de philosophie et fondateur de l’Abbeville Institute*. Il propage des idées sécessionnistes*, mais à un niveau plus sophistiqué que le néo-nazi ou le fasciste moyen. Par exemple, dans une conférence sur YouTube [9], il fait l’éloge des vertus des cités-États grecques de l’Antiquité qui auraient été de véritables républiques (aucune mention de la population majoritaire des esclaves !), et de la civilisation chrétienne médiévale supposée se caractériser par ses nombreux contre-pouvoirs décentralisés. Selon lui, les premiers États américains, membres d’un « Empire de la liberté » tel que le concevait Jefferson, avaient des qualités démocratiques, liées à leur petite taille et à leurs pratiques décentralisatrices, qui auraient été annihilées après la guerre de Sécession et la constitution d’une grande République américaine dotée d’un gouvernement fédéral centralisé et autoritaire. Son modèle : la sécession des États appartenant à l’URSS en 1991, l’autonomie de la Catalogne, de l’Ecosse, du Québec, etc. Son rêve : transformer les Etats-Unis actuels en au moins huit fédérations d’États indépendants de taille modeste. Son ennemi principal : la Révolution française qui aurait imposé le modèle d’une République une et indivisible, d’un État centralisé omnipotent, belligène, à toute l’Europe, voire au monde. En clair, il offre une caution intellectuelle aux militants incultes de l’extrême droite qui se réclament du « décentralisme », du « localisme », de l’« auto-gouvernement » ou des « écorégions ».